Quand l’eau se retire : pagayer en période de bas niveau 

Par : Jean-François Milot

Coordonnateur en géomatique

Les adeptes de sports à pagaie le savent bien : chaque sortie sur l’eau est différente. Le vent, la météo, l’achalandage… mais aussi le niveau de la rivière ou du lac (Figure 1). Ces dernières années, plusieurs régions du Québec ont connu des niveaux d’eau particulièrement bas en raison de sécheresses ou de variations climatiques. Pagayer dans ces conditions demande une bonne dose d’adaptation et une conscience accrue de son environnement. 

Voici donc quelque indicateur à prendre connaissance avant de partir à l’aventure sur les plans d’eau du Québec lorsque nous nous trouvons en période de base eau. Le tout étant surtout d’assurer le succès de notre sortie !  

22 juillet 2025
30 septembre 2025

Figure 1 : Photo présentant la même mise à l’eau à gauche 22 juillet 2025 et à droite 30 septembre 2025. En observant le quai flottant, on note un la différence du niveau d’eau. 

Lire le paysage autrement 

Un premier signe frappant : la lisière fluviale s’élargit. Là où l’eau atteignait jadis le couvert végétal, on découvre maintenant une plage de galets, de vase ou de sable (Figure 2). C’est souvent un espace à traverser à pied avant de pouvoir mettre sa planche ou son canot à l’eau. Une mise à l’eau plus longue, parfois glissante, qui peut ralentir le départ et demander plus d’effort logistique. 

Figure 2 : Lisière fluviale qui s’élargit expose les roches normalement submergées. 

Les hauts-fonds à fleur de pagaie 

Un niveau d’eau bas fait ressortir des hauts-fonds, des roches et des troncs jusque-là invisibles. La pagaie peut y racler, l’embarcation peut s’y accrocher, et, dans les pires cas, se fissurer. Ces zones sont aussi parfois riches en biodiversité (herbiers, nids de poissons), ce qui demande encore plus de précautions pour éviter de perturber l’écosystème. 

La qualité de l’eau en question 

Lorsque le débit est faible, l’eau circule moins. Elle peut devenir plus chaude, plus stagnante et plus concentrée en particules (Figure 3). Après un épisode de pluie, les polluants agricoles ou urbains se concentrent plus facilement dans un faible volume d’eau, ce qui peut réduire la qualité générale. Résultat : une baignade moins invitante et une vigilance accrue pour éviter de boire la moindre goutte. 

Figure 3 : On observe une concentration de particule et d’algue.
Figure 3 : On observe une concentration de particule et d’algue. 

Fragilité accrue des milieux et espèces envahissantes 

Lorsque le niveau d’eau est bas, les berges et les hauts-fonds deviennent plus exposés et vulnérables. Le simple fait de marcher ou de traîner une embarcation dans ces zones peut écraser les jeunes pousses aquatiques, perturber les habitats de fraie ou endommager les herbiers déjà fragiles. Ces conditions favorisent aussi l’implantation d’espèces végétales envahissantes, comme le myriophylle à épis, qui profite de l’ensoleillement accru et des zones peu profondes pour coloniser rapidement un plan d’eau. Une fois installé, ce type de végétation dense complique la navigation, réduit la biodiversité et peut transformer la dynamique entière de l’écosystème.  

Une cohabitation plus serrée 

Moins d’eau signifie aussi moins d’espace navigable. Les embarcations motorisées se retrouvent confinées aux mêmes couloirs que les sportifs à pagaie. Cela réduit la marge de sécurité, augmente les risques de vagues croisées ou de collisions, et exige une vigilance redoublée. 

Pagayer avec conscience 

La pratique reste possible et agréable, mais elle doit être adaptée : 

  • Vérifier les niveaux d’eau avant de partir (Info-débit, applications de rivières, etc.). 
  • Prévoir des chaussures adaptées pour marcher dans le lit découvert ou vaseux. 
  • Porter une attention particulière à la météo, surtout après des pluies. 
  • Ajuster son parcours pour éviter les zones trop fréquentées par les bateaux à moteur. 
  • Utiliser uniquement les mises à l’eau aménagées (rampe, quai, plage officielle). 
  • Éviter de marcher ou de traîner l’embarcation sur les zones découvertes ou les herbiers fragiles. 
  • Inspecter, nettoyer et bien sécher l’équipement avant de passer d’un plan d’eau à un autre. 

Les bas niveaux d’eau transforment la relation qu’on entretient avec la rivière. Cela peut sembler une contrainte, mais c’est aussi une occasion d’apprendre à lire un plan d’eau autrement et de prendre conscience de la fragilité des milieux aquatiques. 

Outils et références à consulter sur le sujet :

Mieux s’orienter en naviguer comprendre la dynamique d’une rivière :

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